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La droititude
3 mars 2012

Sarkozy, l'homme que l'on aime détester

Il y a de cela quelques mois François Hollande avait eu cette formule : « L'anti-sarkozysme n'est pas un programme ». Une réflexion à laquelle on souscrira volontiers. Mais qui, en même temps, souligne la réalité d'un phénomène très singulier : la haine dont fait l'objet Nicolas Sarkozy. Jamais, en effet, sous la Cinquième République, un chef de l'Etat n'a été autant détesté que l'actuel locataire de l'Elysée.

Il a sans doute tous les défauts du monde et sa politique aussi. Déjà il est de droite. Mais Jacques Chirac l'était aussi. Tout comme, mais d'une toute autre façon (culturelle et intellectuelle), l'était François Mitterrand, le président de la République de La Force Tranquille, posant devant une église, ce qui, pour le moins, ne fait pas vraiment partie du panthéon de la gauche. En outre Sarkozy a multiplié les initiatives symboliques qui ont semé le trouble dans son propre camp. Suppression de la double peine, célébration de Guy Môquet, jeune héros communiste, invocation des mânes de Jean Jaurès. Si on veut, en cela et pour cela, Sarkozy peut être critiqué et combattu politiquement.

Mais la haine ? La haine qui souille définitivement ceux qui la professent ? Le TSS (Tout Sauf Sarkozy) ? Les racines sont à chercher ailleurs. Nicolas Sarkozy est un personnage atypique, presque incongru dans le paysage hexagonal. Un extraverti qui, manifestement, n'a pas cherché à se couler dans le moule du charme discret de la bourgeoisie française. Il a des copains riches (Chirac, Mitterrand, Giscard d'Estaing n'en avaient-ils pas?) et il s'affiche – l'inconscient!- avec eux au Fouquet's. Il souhaite des vacances confortables et s'installe sans aucun complexe sur le yacht de Bolloré. (Chirac, lui, partait très loin des regards aux Seychelles, dans un hôtel pour milliardaires, et Mitterrand allait du côté du Caire, dans une résidence qui n'était pas faite pour les pauvres). Il ne déteste pas les Rolex et en porte une au poignet. Ses femmes font jaser et posent pour les magazines. Trois femmes seulement : Marie-Dominique, Cécilia puis Carla. Mais on en parle comme si elles étaient des centaines... Ah ! Ce n'est pas à Chirac, le bon gars bien de chez nous, que ce serait arrivé ! Quand il présidait aux destinées du RPR, on le surnommait rue de Lille : « 3 minutes, douches comprises ». Mais les étreintes se déroulaient discrètement, à la chaîne, dans son bureau.

De surcroît, Sarkozy ne fait même pas peur. On l'affuble de toutes les références possibles aux « heures les plus sombres de notre Histoire ». Fasciste, liberticide, dictateur, fils de Pétain. Et pourtant on l'insulte sans crainte. « Me touche pas, tu vas me salir ! » lui lance un olibrius au Salon de l'Agriculture (on a retenu de cet épisode seulement la réponse de l'intéressé : « Casse-toi pauv' con ! »). « Enculé ! » lui crie un marin pêcheur quelque part du côté de Saint-Nazaire. Et lors d'une autre visite présidentielle Sarkozy prend ce qu'il est convenu d'appeler un bain de foule. Alors un individu, dont le geste passera sûrement à la postérité, s'essuie ostensiblement la main qui a serré celle du chef de l'Etat. Et qu'est-il arrivé à ces intrépides résistants ? Quelles tortures leur a infligées la gestapo sarkozyste ? Dans quelles geôles secrètes croupissent leurs corps meurtris ? C'est ainsi. Nicolas Sarkozy ne fait pas, vraiment pas, Président. En Hongrie peut-être... Mais chez nous il reste pour toujours un métèque de la politique.

Une histoire pour conclure. Elle dit tout sur la malédiction qui poursuit Sarkozy. Un jour l'ambassadeur d'Israël est reçu à l'Elysée. Sarkozy a l'air triste. « Que vous arrive-t-il Monsieur le Président ? ». « Tout va mal. Les sondages sont mauvais. Il faudrait un miracle pour que je sois réélu ». « Mais vous pouvez faire un miracle Monsieur le Président. Venez chez nous sur les bords du Lac Tibériade ». « Comment ça ? » demande Sarkozy interloqué. « Eh bien, il y a plus de deux mille ans, un des nôtres a réussi : il a marché sur l'eau ». Le Président demande à réfléchir.

Puis ayant consulté ses proches, et la situation paraissant vraiment désespérée, il se décide. Accompagné de son entourage et de tout ce que la France compte de journalistes, il se rend sur les bords du Lac Tibériade. Et là il s'avance et marche sur l'eau ! Hosannah, Hosannah ! Chez les sarkozystes, c'est l'extase. Nadine Morano esquisse une danse lascive et érotique. Nathalie Kosciusko-Morizet se jette dans les bras de Jean-François Copé. Et François Fillon, comme possédé, entre en transe. Et le lendemain ? Le lendemain la presse française, unanime, titre : « Sarkozy ne sait pas nager ».


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